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Les lacs sont très souvent associés à des légendes locales dont l'origine se perd dans la nuit des temps. L'Auvergne avec ses volcans, forêts sombres, lacs et autres grottes n'échappe bien évidement pas à la règle. Il faut dire que les nombreux lacs et sources minérales aux vertus légendaires, ont de quoi susciter des interrogations. Il serait donc facile de faire un jeu de mots vaseux à propos des mystérieuses eaux vergnates mais ce serait oublier que les légendes ont bien souvent un fondement réel ! Profitant d'une visite estivale au plus profond des lacs d'Auvergne, j'ai rapporté quelques images de cette curiosité géologique et scientifique.
Le Lac Pavin se cache dans une magnifique hêtraie et en faire le tour ne vous prendra qu'une petite heure durant laquelle, à aucun moment, il n'est possible d'en apprécier totalement la forme circulaire ou d'en approcher l'eau, les berges étant très escarpées et dangereuses. Mais quand le ciel se dégage et que le vent ride sa surface de petites vagues d'argent, le lac Pavin est d'une beauté fascinante. Pourtant, ces eaux émeraudes ont justifié bien des légendes et abritent de réels mystères scientifiques.
Situé à presque 1200 m d'altitude, le lac s’est formé par phréatomagmatisme, autrement dit il s'agit d'un cratère circulaire de volcan ou maar. Mais c'est surtout sa profondeur de 92 m qui retiendra l'attention des scientifiques. Contrairement à ses voisins du Sancy, il est d'origine très récente (environ 6 900 ans). Si les eaux sont d'un superbe vert émeraude par beau temps, elles virent au noir terrifiant et insondable par mauvais temps. On raconte à ce propos qu'il ne faut pas y jeter de pierre comme l'écrit le cosmographe François de Belleforest au XVIe siècle qui dépeint un lac capable de déclencher « tonnerres, éclairs, pluie et grêle » si on jette une pierre dedans.
D'ailleurs, même son nom devrait nous faire frissonner. Il viendrait du latin« pavens » signifiant « craindre » ou encore « redouter ». Comme le rappel l'excellent article de France Culture un manuscrit de 1650 évoque le Pavin et en son sein « le souffle maudit [des démons qui] soulèvent les tempêtes pendant que les feuilles pendent sans balancer aux branches, et leur haleine attire dans les tourbillons l’imprudent égaré dans le gouffre ».
D'ailleurs, même son nom devrait nous faire frissonner. Il viendrait du latin« pavens » signifiant « craindre » ou encore « redouter ». Comme le rappel l'excellent article de France Culture un manuscrit de 1650 évoque le Pavin et en son sein « le souffle maudit [des démons qui] soulèvent les tempêtes pendant que les feuilles pendent sans balancer aux branches, et leur haleine attire dans les tourbillons l’imprudent égaré dans le gouffre ».
Ces récits de bouillonnements et d’éclairs correspondent-ils à la remontée de gaz dissous dans les sédiments et à leur inflammation spontanée ? Une hypothèse qu'il ne faut pas prendre à la légère. En 1986, au Cameroun, suite sans doute à un glissement de terrain, le lac Nyos a libéré une énorme quantité de CO2 entraînant la mort de plus de 1.700 personnes et de milliers de têtes de bétail. Cette « éruption limnique » a attiré l’intérêt soudain des scientifiques autour du lac auvergnat, qui présente des conditions similaires.
Le plus profond des lacs d’Auvergne a aussi bien des révélations scientifiques à nous offrir ! Car le Pavin, c'est en faite deux lacs superposés ! Ou plus exactement deux masses d'eau qui ne se mélangent jamais, sauf sur quelques mètres. De la surface jusqu’à une soixantaine de mètres de profondeur c'est un lac classique et poissonneux. Puis au delà des 65 mètres, tout change avec des eaux de compositions très différentes et surtout sans oxygène depuis des millénaires !
Dans ces eaux profondes ont une densité en bactéries est dix fois supérieure à la normale avec plus de 10 millions de bactéries par ml d'eau ! Donc malgré la pression et l'absence d'oxygène, la vie existe dans ses eaux noires notamment des archées méthanogènes (c'est-à-dire productrices de méthane), ainsi que d'autres espèces consommatrices de ce même gaz. Certaines archées d'ailleurs parviendraient à oxyder une partie du méthane qu'elles produisent pour le consommer. Un milieu que ne manque pas d'étudier les scientifiques à la recherche des origines de la vie sur Terre ou de nouveaux remèdes.
Les chercheurs en géochimie, microbiologie, sédimentologie, paléolimnogie, histoire et autres discipline ont fait le point dans Lake Pavin un ouvrage de 450 pages en anglais reprenant plus de de 1.800 références scientifiques ou mythologiques.!
Une autre légende est reprise par les brochures touristiques. Ce lac serait né de la colère divine face aux mœurs légères des femmes de l'ancienne ville de Besse : Dieu aurait noyé la cité sous des eaux diluviennes afin de punir ses habitantes. Le clocher de l'ancien village englouti serait même visible par temps ensoleillé…
Un légende qui pourrait elle aussi faire référence à des phénomènes naturels rares mais bien réels ! Ainsi des études sédimentaires, des suivis acoustiques et diverses approches pluridisciplinaires ont aussi permis de comprendre que ce lac a connu des changements pouvant être associés à des vagues d’eau violentes ayant entraînées des coulées de boue.
Les légendes de ville engloutie (1880-1900), ou celle du dragon assourdissant qui a tout détruit (vers 1632), sont peut-être liées à des glissements de berges ou débordements expliqués (travaux de Lavina, Del Rosso, Chapron…). Une théorie battue en brèche par leurs détracteurs du laboratoire Magmas et Volcans ou par certains historiens pour qui la cité était particulièrement prospère au Moyen-âge, ce qui semble peu compatible avec une telle catastrophe.
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